Responsabilité du fait d’un vaccin défectueux et lien de causalité

Les articles 1386-1 et suivants du Code civil, codifiés par la loi n° 98-389 du 19 mai 1998 transposant la directive (CE) n°85/374 du Conseil du 25 juillet 1985, régissent la responsabilité des producteurs du fait des produits défectueux.

L’article 1386-9 du Code civil dispose que la victime doit rapporter la preuve d’un lien de causalité entre le défaut d’un produit et le dommage.

La Cour de cassation a fait, dans un premier temps, une interprétation stricte de ces dispositions et a pu censurer un arrêt de Cour d’appel ayant retenu la responsabilité du laboratoire fabricant en considérant qu’aucun élément scientifique ne permettait de retenir une association entre la vaccination et la maladie, le lien de causalité était jugé comme défaillant (Civ. 1ere, 23 sept. 2003, n° 01-13.063).

En ce qui concerne l’administration d’un médicament, la Cour de cassation a retenu l’existence d’un rapport causal lorsque des éléments scientifiques rendaient vraisemblable le lien entre le médicament et la maladie et qu’il  n’existait pas d’autre cause de survenance de cette maladie (Civ.1er. 5 avril 2005, n° 02-11.947).

Au fil des jurisprudences, et notamment lors de deux décisions du 22 mai 2008, la Cour de cassation a assoupli son interprétation des dispositions de l’article 1386-9 du Code civil en admettant que la preuve du lien de causalité entre l’usage du produit et le dommage puisse résulter de simples présomptions qui devaient être  « graves, précises et concordantes » (Civ.1er, 22 mai 2008, n° 05-20.317 et 06-10.967).

Cette allègement du fardeau probatoire pour la victime n’a pas empêché la Cour de cassation à rester très exigeante pour admettre de telles présomptions (Civ. 1er, 22 janv. 2009, n° 07-16.449).

Dès lors, dans le cadre de leur pouvoir souverain d’appréciation, les juges du fond peuvent considérer au cas par cas, par un faisceau d’indices (délai écoulé entre l’administration du vaccin et la survenance d’une maladie, antécédents familiaux) si les éléments présentés constituent des présomptions graves, précises et concordantes, de nature à prouver la maladie en cause.

Par un arrêt du 19 novembre 2015, la Cour de cassation a pu relever qu’un arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) avait considéré que « la directive n’a pas vocation à harmoniser de manière exhaustive le domaine de la responsabilité du fait du produit défectueux au-delà des points qu’elle règlemente ».

Toutefois, la CJUE ajoutait qu’ « il convient de vérifier si l’existence, dans la règlementation d’un Etat membre, d’un droit d’obtenir des renseignements n’est pas de nature à porter atteinte à la répartition de la charge de la preuve telle que prévue à cet article par le législateur de l’Union » (CJUE 20 nov. 2014 aff. C.310/13).

Ainsi, la Cour de Justice préconisait que les éléments visés par la directive ne devaient pas être interprétés dans un sens contraire à la Directive.

Or, le recours aux présomptions, comme prévu par la Cour de cassation, notamment lorsqu’elle suggère que les éléments servant à prouver l’imputabilité suffiraient à prouver la défectuosité, semble difficilement compatible avec l’article 4 de la Directive prévoyant les modalités de preuves du lien de causalité litigieux.

Dès lors, la Cour de cassation a décidé de renvoyer trois questions préjudicielles à la CJUE  à savoir :

  • Sur la validité d’une preuve par présomption
  • En cas de réponse positive, sur la validité du caractère irréfragable de la présomption ainsi édictée,
  • En cas de réponse négative, sur le fait que l’existence d’un lien de causalité litigieux ne puisse être considéré comme rapporté que si ledit lien serait établi de manière scientifique.

 Note rédigée par Frédéric POURRIERE.

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