Veille juridique sur la copropriété - 1ER SEMESTRE 2024

Ces arrêts apportent des éclaircissements sur des sujets portant sur la copropriété comme l'accès des forces de l'ordre aux parties communes, le refus de travaux par l'assemblée générale, ou encore la responsabilité du syndicat pour des sinistres.

Nous réalisons cette veille juridique pour offrir un panorama des évolutions récentes, particulièrement utile pour les avocats spécialisés en droit de copropriété, ainsi que pour les copropriétaires, en quête d’une meilleure compréhension des règles de copropriété et des responsabilités qui en découlent.

Responsabilité du syndic et règles de copropriété

Pénétration des forces de l’ordre dans les parties communes

(Cass. crim., 12 décembre 2023, n° 23-81.877)

Dans cet arrêt, les services de police sont intervenus dans les parties communes d’un immeuble en copropriété – une cave a été ouverte.

L’arrêt d’appel attaqué avait considéré que les agents de police avaient opéré dans le cadre d’une mission de police administrative, sur instructions du commissaire de police prescrivant le contrôle des caves et des communs d’un quartier. Les magistrats ont ajouté que, selon l’évolution du cadre législatif résultant de la loi du 25 novembre 2021 (2021-1520) modifiant l’article L 272-1 du Code de la sécurité intérieure et de l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965, les services de gendarmerie et de police, à l’exception de la police municipale, peuvent désormais avoir accès aux parties communes d’une copropriété aux fins d’intervention, de façon permanente, sans autorisation préalable des propriétaires ou exploitants d’immeuble.

Dans son arrêt du 12 décembre dernier, la Cour de cassation a confirmé l’arrêt de la Cour d’appel en rappelant que, comme l’a énoncé le Conseil constitutionnel dans sa décision du 14 septembre 2023 (2023-1059 QPC), les dispositions de l’article L 272-1 du Code de la sécurité intérieure ont pour objet de permettre aux forces de l'ordre d’accéder en permanence aux parties communes des immeubles, y compris celles qui ne sont pas librement accessibles, aux fins d’intervention dans le cadre de leurs missions d’urgence et de protection des personnes et des biens.

En l’espèce, la réserve émise par le Conseil constitutionnel était respectée, les policiers qui sont entrés dans les parties communes l’ont fait dans le cadre de l’exercice d’une mission de police administrative de protection des personnes et des biens.

Refus de l’Assemblée Générale des copropriétaires sur des travaux d’un copropriétaire

(Cass. 3ème Civ., 16 novembre 2023)

Dans cet arrêt, l’assemblée générale des copropriétaires a rejeté les demandes d’autorisation de travaux présentées par une société copropriétaire pour transformer ses locaux en un bâtiment à usage commercial et hôtelier.

La cour d’appel avait rejeté les demandes de la société aux motifs que les travaux envisagés impliquaient une ouverture et un droit de passage sur la cour, ce qui emportait modification du règlement de copropriété quant à la jouissance d’une partie commune spéciale d’un bâtiment.

En outre, vu l’importance des travaux, la Cour de cassation a considéré que les juges du fond ont pu en déduire que les travaux envisagés relevaient de l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965, ce qui justifiait également la décision de refus des travaux par l’assemblée générale.

Par ailleurs, la société invoquait un abus de droit. La Cour de cassation a rappelé à cette occasion qu’il appartient à celui qui l’invoque de prouver que la décision est contraire aux intérêts collectifs des copropriétaires ou qu’elle a été prise dans le seul but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires.

La cour d’appel avait retenu que la société n’était pas fondée à soutenir que la création d’une issue de secours sur la cour était une exigence de sécurité pour l’exploitation de son lot à usage d’hôtel, ni qu’elle constituait une mise en conformité indispensable à cette destination, au regard, notamment, des solutions alternatives existantes. La Cour de cassation a donc considéré que la société ne démontrait pas l’intention de nuire des autres copropriétaires.

Responsabilité des copropriétaires – cas de force majeure

(Cass. Civ. 3ème, 30 novembre 2023)

Une société, preneuse à bail commercial, exploitait un local en sous-sol d’un immeuble soumis au statut de la copropriété. Elle a subi un dégât des eaux ayant pour origine le dysfonctionnement d’une pompe de relevage et a donc assigné le syndicat des copropriétaires en responsabilité.

Selon les dispositions de l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965, le syndicat des copropriétaires est responsable de plein droit des vices de construction ou du défaut d’entretien de l’immeuble et ne peut s’en exonérer qu’en rapportant la preuve d’une force majeure ou d’une faute de la victime ou d’un tiers ayant causé l’entier dommage.

Le syndicat se défendait en avançant qu’il n’avait pas eu connaissance de la présence de la pompe de relevage sur une canalisation collective d’évacuation des eaux pluviales, installée à la seule initiative des bailleurs dans leur partie privative.

La Cour de cassation a considéré que le syndicat des copropriétaires, n’ayant pas pu établir que le fait des bailleurs présentait le caractère de force majeure, n’était pas en mesure d’être exonéré de la responsabilité qui pèse sur lui en vertu du texte susvisé.

Responsabilité des copropriétaires – cause exonératoire

(Cass. 2ème Civ., 30 novembre 2023)

Un enfant de 7 ans a fait une chute du 5ème étage dans la cage d’escalier d’un immeuble.

Le syndicat avait été condamné par la Cour d’appel à indemniser les parents de la victime aux motifs que, si le garde-corps du palier du 5ème étage ne présentait aucun caractère anormal, l’extrémité de la rampe au niveau du RDC, constituée d’une tige filetée non recouverte d’une boule, présentait un danger. De plus, la tige dépassant de la rampe avait été heurtée par l’enfant lorsqu’il est tombé.

La Cour de cassation a considéré que la Cour d’appel avait pu déduire que l’extrémité de la rampe du RDC présentait une configuration anormale et que cette chose inerte, violemment heurtée par la victime, avait été l’instrument du dommage et que ce risque pouvait être évité. Elle en a exactement déduit que le syndicat des copropriétaires ne justifiait pas d’une cause d’exonération de la responsabilité qui lui incombe sur le fondement de l’article 1384, devenu 1242 du Code civil.

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Responsabilité du syndic pour le suivi des travaux

(Cass. 3ème Civ., 16 novembre 2023)

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Des travaux ont été réalisés au sein de la copropriété – le syndic était chargé du suivi des travaux compte tenu de l’absence de maître d’œuvre.

Plusieurs malfaçons ont été relevées, et la société réalisant les travaux s’est trouvée en liquidation judiciaire.

Le syndicat des copropriétaires a assigné le syndic en responsabilité contractuelle sur le fondement de l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965, précisant que le syndic est responsable, à l’égard du syndicat, des fautes commises dans l’exercice de sa mission.

Pour le syndicat, le syndic aurait dû attirer l’attention des copropriétaires sur la nécessité de s’adjoindre le concours d’un maître d’œuvre ou d’un ingénieur en structures.

La Cour de cassation a considéré dans son arrêt que le syndicat des copropriétaires invoquait des manquements dans le suivi des travaux et dans les paiements faits à l’entreprise, sans qu’il soit constaté que le syndic avait accompli toutes les diligences lui incombant dans la gestion des travaux.

Mesures conservatoires possibles pour charges impayées

Le statut de la copropriété prévoit déjà un cadre incitatif et rapide de recouvrement des sommes dues. En effet, l’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit qu’à défaut du versement à sa date d’exigibilité d’une provision due, et après une mise en demeure restée infructueuse passé un délai de 30 jours, les autres provisions non encore échues ainsi que les sommes restantes dues, appelées au titre des exercices comptables précédents après approbation des comptes, deviennent immédiatement exigibles.

Tout créancier peut contraindre son débiteur défaillant à exécuter ses obligations à son égard, mais de telles mesures d’exécution forcée nécessitent au préalable l’obtention d’un titre exécutoire.

Or, durant ce délai, les copropriétaires assument la dette résultant des impayés des copropriétaires défaillants.

Ainsi, pour pallier cette difficulté, le gouvernement a porté en première lecture à l’Assemblée nationale un amendement permettant de procéder à des mesures conservatoires sur les biens de ces débiteurs, sans autorisation préalable du juge.

Cette mesure figure désormais à l’article 19 de la loi du 9 avril 2024 modifiant l’article L 511-2 du Code des procédures civiles d’exécution :

« Une autorisation préalable du juge n'est pas nécessaire lorsque le créancier se prévaut d'un titre exécutoire ou d'une décision de justice qui a force exécutoire. Il en est de même en cas de défaut de paiement d'une lettre de change acceptée, d'un billet à ordre, d'un chèque, des provisions mentionnées au premier alinéa de l'article 19-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, exigibles ou rendues exigibles dans les conditions prévues au même article 19-2, ou d'un loyer resté impayé dès lors qu'il résulte d'un contrat écrit de louage d'immeubles. »

Pourquoi faire appel à un avocat en droit de la copropiété ?

La complexité croissante des problématiques liées à la copropriété souligne l'importance pour les syndics et copropriétaires de se faire accompagner par un avocat en droit de copropriété. Qu'il s'agisse de la gestion des parties communes, de l'exécution des travaux ou des recours contre les impayés, les règles de copropriété évoluent rapidement et nécessitent une vigilance constante.

Les avocats spécialisés en copropriété sont là pour protéger les droits des copropriétaires tout en assurant le respect des obligations légales et contractuelles des syndicats de copropriété.

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